Si le concept de développement durable est aujourd’hui bien connu, celui de conception numérique responsable l’est beaucoup moins. Que recouvre cette démarche ? Comment la mettre en pratique ? Éléments de réponse avec Frédéric Bordage, expert du sujet chez GreenIT.fr.
Acheter ses cadeaux de Noël en ligne, réserver un billet d’avion, regarder une vidéo en streaming, faire ses courses au drive… Le numérique est au cœur de notre quotidien. Nous en avons peu conscience mais les impacts environnementaux de ces actions, qui nous paraissent aujourd’hui banales, sont loin d’être négligeables. « En 20 ans à peine, entre 1995 et 2015, le nombre d’internautes dans le monde a été multiplié par 71 », indique Frédéric Bordage. Aujourd’hui, plus de 3 milliards d’internautes surfent chaque jour sur le web. Et ils seront 5 milliards d’ici 2020. La croissance du nombre de terminaux est elle aussi exponentielle. En 2015, on comptait 9 milliards de terminaux dans le monde, contre « seulement » 3 milliards cinq ans plus tôt. Et c’est justement au niveau des terminaux des internautes que se concentre l’empreinte écologique.
L’impact de nos ordinateurs
Pour Frédéric Bordage, « la marge de progression en termes de réductions d’impacts environnementaux se situe clairement au niveau de l’environnement utilisateur ». Pour une raison simple : on compte 200 terminaux (ordinateurs, smartphones, tablettes, etc.) pour un serveur. Nos ordinateurs contiennent des cartes mères, de la mémoire vive, des processeurs… Les Analyses de Cycle de Vie (ACV), réalisées par des laboratoires indépendants, montrent le niveau important des impacts de ces composants sur l’environnement. « L’enjeu va bien au-delà des émissions de gaz à effet de serre et de la réduction de la consommation électrique des datacenters. C’est bien la fabrication des composants électroniques des terminaux des utilisateurs qui pose le principal problème ». Pour Frédéric Bordage, pas de doute, « la façon la plus simple et la plus efficace de réduire notre empreinte écologique numérique, c’est d’allonger la durée de vie active des équipements ».
En finir avec l’obsolescence programmée
Et cela passe avant tout par une conception différente des logiciels et des services numériques. Qui n’a jamais changé d’ordinateur simplement parce qu’une nouvelle génération de logiciel nécessitait plus de puissance ? « On ne change pas nos terminaux parce qu’ils ne fonctionnement plus mais bien parce qu’ils rament lorsqu’on essaie d’utiliser les dernières versions de logiciels. Chaque nouvelle version exige en moyenne deux fois plus de puissance matérielle (mémoire, processeur, etc.) pour fonctionner ». En raccourcissant la durée de vie des logiciels, on raccourcit aussi la durée de vie du matériel.
Répondre aux besoins réels des utilisateurs
La solution : supprimer les fonctionnalités superflues. 45 % des fonctionnalités des logiciels ne sont jamais utilisées. « Tout commence par se concentrer sur les besoins fonctionnels réels des utilisateurs, c’est-à-dire les 20 % qui constituent 80 % des utilisations », insiste Frédéric Bordage. Il s’agit donc de se focaliser sur l’essentiel, de concevoir un service numérique qui va répondre aux besoins de l’utilisateur et lui donner satisfaction. La conception responsable de service numérique est une démarche profonde d’amélioration continue, qui vise à réduire l’empreinte écologique, économique et sociale d’un service numérique. Bien plus qu’un outil, c’est une véritable philosophie, dans laquelle les équipes de Com6 interactive se retrouvent.
Des gestes simples
L’empreinte annuelle moyenne d’un internaute est de l’ordre de :
- 350 kWh d’électricité ;
- 200 kg de gaz à effet de serre ;
- 3 000 litres d’eau.
Des gestes simples peuvent pourtant nous permettre de réduire significativement, et quasiment sans effort, les impacts environnementaux associés à notre usage d’internet :
- Allonger la durée de vie des équipements. On l’a vu, c’est la fabrication des équipements des internautes et des objets connectés qui concentre le plus d’impacts. Le geste clé consiste donc à utiliser le plus longtemps possible les équipements existants.
- Éteindre sa box et le boîtier TV quand on ne s’en sert pas. Allumés 24h/24, une box ADSL et le boîtier TV associé consomment de 150 à 300 kWh par an, soit la consommation électrique annuelle de 5 à 10 ordinateurs portables, utilisés 8 heures par jour ! En éteignant sa box le soir, on peut facilement économiser 65 à 130 kWh, soit 8 à 16 euros par an et 650 à 1 300 litres d’eau.
- Limiter l’usage du cloud au strict nécessaire. Le stockage en ligne de ses e-mails, photos, vidéos, musiques et autres documents impose des allers-retours incessants entre le terminal de l’utilisateur et les serveurs. Or, transporter une donnée sur internet consomme deux fois plus d’énergie que de la stocker pendant un an. Favorisons donc au maximum le stockage et l’usage local de nos données.
Et le web dans tout ça ?
Le poids moyen d’une page web a été multiplié par 3 entre 2010 et 2015. Et par 115 entre 1995 et 2015 ! Le Collectif Numérique Responsable a mis au point une checklist de 115 bonnes pratiques, diffusée avec les outils du collectif Greenit, visant à réduire l’empreinte écologique des sites internet tout en optimisant leurs performances. Un bon début !
Le poids moyen d’une page web a été multiplié par 3 entre 2010 et 2015. Et par 115 entre 1995 et 2015 ! Le Collectif Numérique Responsable a mis au point une checklist de 115 bonnes pratiques, diffusée avec les outils du collectif Greenit, visant à réduire l’empreinte écologique des sites internet tout en optimisant leurs performances. Un bon début !